Ancien article de presse, mais toujours d'actualité.
Entre poésie et actualité
Exposition de l'artiste-peintre marocain Abdellatif Zeraïdi à Gasperich (Luxembourg)
Jusqu'au 6 juin, le comité de liaison et d'action des étrangers (CLAE) acceuille dans ses locaux de Gasperich le peintre marocain Abdellatif Zeraïdi. Né en 1960 à Ouezzane dans le Rif marocain, l'artiste intégre à l'âge de 20 ans l'École nationale des beaux-arts de Tétouan où l'ambiance cordiale et l'émulation fortifient sa vocation et éveillent sa curiosité et son ouverture au monde.
Ses premières œuvres seront des vues de Médinas, de portes Chérifiennes, des purs paysages marocains. Les circonstances de la vie le poussent à quitter son pays natal pour s'installer dans un premier temps en 1988, en France, à Dijon, où il suit les cours de la réputée École nationale des beaux- arts. C'est là que ses tentations vers l'abstraction se matérialiseront. Plus tard, Zeraïdi est en Italie, et, malgré une vie professionnelle difficile, il n'hésite pas à consacrer du temps à d'élégantes « vedute » vénitiennes.
Installé depuis quelques années à Echternach, Abdellatif Zeraïdi a su saisir l'atmosphère particulière de la ville et la fixer sur la toile avec une maîtrise coloriste et luministe héritée des impressionnistes et des pots-impressionnistes. Ces travaux sur la cité abbatiale ont fait l'objet d'une exposition en 2002.
Ce pendant, il serait restrictif de limiter la production d'Abdellatif Zeraïdi à celle d'un simple paysagiste, domaine que, bien évidement, il ne renie pas. Pourtant, derrière la profondeur et la pureté d'un ciel ou la transparence de la fluidité aquatique se cachent une sensibilité et un intérêt pour des thèmes plus forts, nourris par l'itinéraire personnel de l'artiste.
Ainsi, Zeraïdi puise également son inspiration dans l'actualité qui, depuis le funeste 11 septembre ne peut que déstabiliser ou révolter une sensibilité accrue par la pratique artistique.
Par conséquent, les œuvres présentées au CLAE ont pour thèmes des vues pittoresques d'Echternach et de ses environs mais dépeignent également les douloureux évènements de ces derniers mois comme les bombardements sur Kaboul ou la seconde guerre du Golfe. « Le petit Irakien mourant » est une œuvre insoutenable alors que « L'enfant afghan » est une composition poignante pleine de réalisme et comme prophétique. La facture de l'artiste joue sur une gestuelle alerte, rapide, avec une construction solide, géométrisée par une structure en grille.
Le traitement de la lumière offre tantôt des effets de clair-obscur, tantôt des transparences puisées dans l'observation de l'eau, qui prennent une valeur symbolique. Celle de la volonté d'aller au-delà des choses, tout en exprimant le monde intérieur de l'artiste avec la plus grande spontanéité et même impulsivité.
Nathalie Becker (Historienne critique d'art)
Journal « Luxembourg-Wort » Luxembourg, le 30.Mai 2003
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